Dimanche 23 février 2024
VIIème dimanche Temps Ordinaire
Quand le Carême frappe à nos portes un peu plus tôt que prévu
Chers amis, après avoir examiné la situation économique de l’Église de France et celle du diocèse d’Avignon, nous nous penchons aujourd’hui sur les finances des paroisses de notre secteur Notre-Dame du Ventoux. Dans cet éditorial, je me limiterai à synthétiser et à présenter les conclusions de l’étude économique des paroisses que vous retrouverez plus en détail dans un petit livret à part. Asseyez-vous confortablement, car ça va piquer...
Il était une fois, il y a fort longtemps, un curé envoyé et mandaté par l’évêque pour former un seul et unique grand secteur, son nom était CAULLE, le Père Benoît CAULLE. C’était donc dans les années 2013, il y a un peu plus de 10 ans, que les choses ont commencé à se mettre en place pour réunir progressivement mais sûrement, d’abord avec le Père Benoît ensuite avec le Père Charles-Bernard, les paroisses du secteur à la fois au niveau territorial et pastoral mais aussi au niveau économique et comptable.
En 2018, l’ancien archevêque, grâce à l’apport de communautés nouvelles et de prêtres fideidonum, a pu ouvrir et desservir de nouvelles paroisses. Dans notre secteur, cela s’est traduit par la scission en 2019 de la Paroisse Notre-Dame du Ventoux en deux secteurs pilotés par l’arrivée du Père Yannick à Mazan-Caromb et le Père Sébastien à Bédoin, ainsi que l’arrivée des sœurs missionnaires au presbytère de Malemort. Cette situation a perduré jusqu’en août 2024, lorsque le Père Nelson et moi-même, curés in solidum, nous avons eu comme mission par le nouvel archevêque celle de réunifier les paroisses en un seul grand secteur.
Le choix de construire et déconstruire, de regrouper et de séparer, dû à une vision pastorale diocésaine différente, a été l’un des éléments qui a fortement impacté les finances de nos paroisses. Ces changements ont, en effet, nécessité d’importants fonds pour la restauration des bâtiments, à la fois pour l’accueil des nouveaux prêtres et des sœurs missionnaires (Bédoin, Malemort) et pour la mise en œuvre d’une vision pastorale qui voyait comme pôle d’attraction le presbytère de Mazan et de Caromb remis à neuf. Parfois les travaux ont pu être financés par des legs ou par les municipalités et de cela nous nous réjouissons.
Il est important de noter que tous ces travaux et choix pastoraux du passé étaient sans aucun doute justifiés et soutenus par les différents conseils économiques et pastoraux de l’époque. Le Père Nelson et moi-même nous nous réjouissons aujourd’hui de pouvoir disposer de bâtiments en bon état, prêts à accueillir de nouvelles missions pastorales. Cependant, il est indéniable que le fait d’avoir mis en commun les forces et les ressources, pour ensuite les séparer et mener deux projets pastoraux distincts, a fragilisé les trésoreries de nos paroisses. D’autant plus qu’à l’heure actuelle, nous manquons d’une vision claire pour l’avenir. Cela est aussi dû à l’actuelle réflexion sur le regroupement territorial des paroisses menée par notre archevêque qui ajoute encore un élément d’incertitude.
L’un des enjeux majeurs des mois et des années à venir sera donc de définir, une fois les frontières de notre secteur définitivement établies, un projet pastoral global cohérent qui tienne aussi compte de la situation immobilière et financière de nos paroisses.
Un autre élément majeur qui s’est dégagé dans notre étude économique est le déséquilibre financier que nos paroisses accusent depuis plus d’une dizaine d’années. On parle de déséquilibre financier lorsque les charges sont plus importantes que les recettes, avec comme résultat celui de puiser au fur et à mesure sur la trésorerie paroissiale qui elle n’est pas inépuisable. Malheureusement, au fil des années, cette situation a progressivement asséché les ressources de nos paroisses.
Si la paroisse de Bédoin a enregistré une perte de 13.000 € depuis la création du secteur en 2019, la situation de Mazan-Caromb est encore plus alarmante : le déséquilibre financier, conjugué au coût élevé des travaux réalisés, a asséché la trésorerie et a empêché de verser sa contribution mensuelle au diocèse depuis deux ans, ce qui a engendré une dette de 40.000 €.
Au 1er septembre 2024, la situation financière de nos paroisses se présente ainsi : la paroisse de Bédoin dispose d’un compte bancaire de 26.700 € au Crédit Agricole. Sur cette somme, 3.700 € sont des offrandes de messe, c’est-à-dire de l’argent versé par le fidèle lorsqu’il sollicite une intention de messe. Cette offrande n’est pas un paiement pour la messe, mais plutôt un don au soutien de ses ministres. Les 23.000 € restants constituent la trésorerie disponible pour les dépenses courantes. En sachant que la paroisse de Bédoin enregistre une perte annuelle moyenne de 2.000 €, si aucune mesure n’est prise pour inverser cette tendance, sa trésorerie sera épuisée d’ici une dizaine d’années. De plus, une réflexion sur l’avenir du presbytère de Bédoin s’impose.
La situation de la paroisse de Mazan-Caromb est plus alarmante. Bien qu’un solde de 32.800 € soit visible sur le compte bancaire du Crédit Agricole, ce chiffre cache une réalité plus sombre. En effet, 36.000 € de ce montant sont constitués d’offrandes de messe, laissant apparaître un déficit de 3.200 € pour les dépenses courantes. En clair, la paroisse de Mazan-Caromb était à découvert de 3.200 € au 1er septembre 2024.
Bien que ces fonds soient, en principe, réservés à la rémunération des prêtres, la pression financière actuelle nous a conduit à une utilisation de ces sommes pour régler des factures courantes. Cette pratique, bien que nécessaire à court terme, pose un problème éthique. De plus, il ne faut pas oublier la dette de 40.000 € envers le diocèse, une obligation financière qui devra être honorée à l’avenir.
Un troisième élément qui entre en jeu est celui d’une importante somme d’argent qu’au fil des années a été confiée au diocèse d’Avignon et bloquée dans un compte dépôt. Cela a été fait dans un esprit de communion et d’entraide pour que le diocèse puisse supporter les nombreuses charges et projets diocésains. Cet argent qui appartient aux différentes paroisses de notre secteur, n’est que difficilement utilisable sinon sous présentation d’un dossier pour des travaux exceptionnels et non pour des charges de la vie courante.
Ces éléments soulignent la nécessité d’une gestion rigoureuse et de stratégies innovantes pour inverser la tendance et assurer la pérennité financière de nos paroisses. Ensemble, nous devrons nous pencher sur plusieurs questions essentielles : comment réduire nos dépenses ? Comment augmenter nos recettes ? Comment gérer notre patrimoine immobilier ? Comment envisager le remboursement de notre contribution au diocèse ? Comment dialoguer avec l’archevêché pour obtenir éventuellement un déblocage des fonds mis en dépôt ?
Chers amis, bien que cette année, le Carême semble avoir frappé à nos portes un peu plus tôt que prévu, j’espère que nous pourrons aborder ce travail avec sérénité, ouverture d’esprit, patience et, surtout, avec une confiance inébranlable en la Providence.